Data & Insights

CPM vs C/GRP ? Un faux débat en trompe l’œil

Tel est l’avis de François Lienart, directeur Data & Insights chez CoSpirit. Il nous en dit plus, au moment où les principaux acteurs et instances du marché réfléchissent à la mise en place de groupes de travail. Au programme de ces derniers : accompagner la transformation des médias via l’amélioration des outils et KPIs de mesures dans un environnement cross media. Selon lui, la profession a d’autres préoccupations à privilégier avant de considérer le CPM comme nouvelle monnaie d’achat (l’attention publicitaire, la nature du contact, les évaluation cross vidéo / média, etc.).

 

François Lienart
Directeur Insight & Data CoSpirit Groupe

Dans quel contexte intervient ce débat ?

François Lienart :

Premier constat : j’observe une paupérisation évidente d’un pan de notre interprofession, sans quoi ce débat n’aurait pas lieu d’être. Une grande partie d’acteurs maîtrise mal certains indicateurs, à commencer par le GRP.

Si l’on reprend la chronologie des faits, contrairement à ce que pensent beaucoup – et particulièrement les jeunes recrues issues du digital qui voient dans le CPM l’indicateur moderne – le CPM est l’indicateur d’évaluation du coût des médias le plus ancien. Le GRP est arrivé plus tard, ouvrant la voie au médiaplanning, puis le C/GRP pour se substituer au CPM.

Pour compléter mon propos, rappelons quelques principes simples permettant d’appréhender ces indicateurs.
Le CPM nous donne une indication de prix pour 1000 contacts, sans toutefois tenir compte de la taille de la cible. Un GRP représente quant à lui 1% des contacts sur la cible. Il nous renseigne simultanément sur une notion de prix (via le cout du GRP), tout en la dimensionnant par rapport à la taille de la cible. Si vous voulez distribuer autant de contacts qu’il y a de personnes dans votre cible, il vous faudra 100 GRP, donc 100 fois le cout d’1 GRP. CQFD ! Impossible à faire avec le seul CPM !

Alors oui, certains vous diront que les populations cibles bougent beaucoup et qu’il est parfois difficile d’estimer la base 100 permettant de produire un GRP. Mais alors, comment savoir combien d’impressions je dois acheter, si je ne connais pas la taille de ma cible, même avec un CPM en main ?

C’est pourquoi je pense que le sens de l’histoire est le C/GRP, et non le CPM. Rappelons que c’est aussi le cas internationalement, notamment au sein du réseau Local Planet auquel nous appartenons.

 

Pourquoi dans ce cas est-il question aujourd’hui de revenir en arrière avec un CPM en lieu et place d’un C/GRP 

François Lienart :

Principalement pour des raisons – discutables – auxquelles sont confrontés certains médias, dont la télévision.

La première est que, dès 2024, Médiamétrie rendra effectif l’élargissement du périmètre de mesure de la TV à tous les foyers français, et non plus aux seuls foyers équipés d’un téléviseur. Il y aura toujours autant de téléspectateurs (voir légèrement plus), mais comme le GRP va baisser (en intégrant les non équipés en TV), le C/GRP va mécaniquement augmenter. C’est un simple effet de bord, mais à priori jugé par certains comme complexe à expliquer au marché. Dans ce contexte, le CPM, qui ne fait pas référence à une base France entière, n’est donc pas affecté et reste flat. Certains seraient donc tentés de choisir la solution de « simplicité » en changeant la mesure. Pour comparaison, remémorons-nous les effets de l’arrivée de l’euro !

Deuxième mauvaise raison : le développement du chiffre d’affaires de la télévision. Aujourd’hui, la TV linéaire se vend à un prix très compétitif, souvent inférieur à 1500/2000€ du C/GRP, soit 3€ à 4€ de CPM, quand le digital – notamment les plateformes de vidéo en ligne – se vendent bien au-delà de 15€ à 40€. Il devient tentant de tirer les prix vers le haut, tout en coupant les référents historiques pratiqués au quotidien en C/GRP en télévision.

Enfin, n’oublions pas que la transformation digitale de la télévision, en particulier dans sa déclinaison segmentée, ajoute à l’équation économique un nouvel entrant – l’opérateur télécom – réclamant sa part du gâteau. Il faut donc augmenter le prix de vente de la télévision pour rémunérer cette assiette élargie.

 

Quelle est la priorité à date, tant pour les agences média que pour les régies ?

François Lienart :

S’il n’est pas surprenant d’entendre le SNPTV et les principales régies TV faire la promotion du CPM, la réflexion commune souhaitée consiste à privilégier les travaux sur la qualification des contacts dans le cadre d’une réflexion cross média, avant d’avancer à marche forcée vers le CPM. Autrement dit, comment comparer sous la bannière du CPM ou du C/GRP des contacts de natures différentes, selon les médias/supports étudiés ?
Avant d’envisager de changer une clé de monétisation, commençons par clarifier, voire uniformiser la nature et définition des occasions de contacts dans le cadre d’une approche cross-media, notamment cross-vidéo.

Enfin, dans un monde prochain sans cookie, le GRP digital prend tout son sens, tout comme la gestion d’une répétition moyenne globale digitale en lieu et place d’un capping historiquement évalué au seul périmètre des huis clos des ad servers. Bienvenue au GRP cross média et par voie de conséquence au C/GRP cross média !

 

 

Si vous voulez en savoir plus, n’hésitez pas à contacter nos experts pour une discussion à bâtons rompus sur le sujet ! Et si vous souhaitez voir aborder une nouvelle thématique pour notre prochain épisode mediah, faîtes-le nous savoir !